Procès de Wikileaks ou procès de Julian Assange? Mardi 25 février 2020 – Violences en réunion

Mardi 25 février 2020 – Violences en réunion

Photo volée fuitée faite le 24 ou 25 février 2020

Monika Karbowska

Le deuxième jour du procès il fait froid, mais ma chambre n’est à qu’à 10 minutes de marche dans le lotissement en face de la prison, j’arrive donc devant la grille du tribunal à 5h45. Je suis la sixième personne dans la file, derrière Patrick Henningsen et un homme et une femme Américains. L’homme est volubile, il tente d’égayer l’atmosphère alors que le jour se lève et nous grelotons emmitouflés dans nos doudounes, manteaux, chapeaux et bonnets. Il chante des airs ironiques à l’attention des policiers et des agents de sécurité. J’apprends plus tard qu’il s’appelle Randy Credico. La conversation s’engage alors cordialement, et je veux alors croire que nous sommes tous ensemble dans le même but : la libération de Julian Assange. C’est une collègue qui me signale la présence de Angela Richter qui munie d’une béquille passe devant nous et parvient à se faire ouvrir la grille. Encore une bonne heure d’attente et nous nous retrouverons devant la porte du bâtiment avant d’être admis à travers les portiques de sécurité. Le deuxième jour il y a nettement moins de monde : les journalistes ont déjà déserté les lieux ce matin et les cars de Gilets Jaunes n’étaient prévus par leur organisateurs que pour une journée. Je pense donc ne pas avoir à subir les bagarres de la veille, même lorsqu’arrivée dans le fameux « sas d’attente » je constate que je suis troisième derrière Henningsen et Richter déjà appuyée sur sa béquille devant la porte de l’escalier de secours. Le sas est vite rempli par notre file et nous patientons encore jusqu’à 9h50. Je suis rassurée également par le fait que Randy Credico, parti chercher un café, reprend naturellement sa place à l’avant même si je vois à l’expression de son visage que la nécessité de se battre pour conserver cette place ne l’enchante guère.

Devant la Woolwich court dans le froid le 25 février 2020

Ma surprise est donc grande lorsque, ayant justement entrevu l’agent de sécurité chargé de déverrouiller la porte, je vois Patrick Henningsen fondre sur moi, me prendre par les épaules, et approcher son visage menaçant tout près du mien. « Tu ne dois pas être là, tu dois partir d’ici » dit-il en substance. Avant que je n’aies le temps de réagir, un autre événement se produit : Sevim Dagdelen, la députée de die Linke entrée avant nous avec une carte de presse, arrive en trombe dans le sas. Elle crie que Kristinn Hrafnsson a été arrêté par la sécurité à l’entrée car il ne faisait pas partie des 18 premières personnes et qu’il faut « donc » que quelqu’un lui cède sa place. C’est alors que tous les regards de l’hostile assistance se tournent vers moi, comme si j’étais la gêneuse dont il faut se débarrasser à tout prix. Sous le choc, je ne trouve pas d’autres mots que mes arguments habituels « j’ai le droit d’être là comme vous, nous sommes tous égaux » mais le ton de la députée se fait agressif.

Sevim Dagdelen, députée de die Linke et mon agresseure du 25 février 2020

Brusquement ce sont trois personnes qui me somment de déguerpir comme si elles avaient un droit naturel à décider de ce que je peux faire et de ce qui me serait interdit. Rebecca Vincent emboite le pas à Sevim Dagdelen : elle crie « tu ne fais pas partie des soutiens de Wikileaks tu n’as pas ta place ici » !  J’avais remarqué qu’elle ne me portait aucune sympathie mais je n’imaginais pas une seconde que des personnalités ayant des positions sociales aussi honorables (députée au Bundestag, journaliste…) puissent sonner une espèce d’hallali contre la citoyenne lambda que je suis. On dirait une ambiance de secte ou seuls les initiés ont le droit de passer la porte du saint des saints. Or, c’est un tribunal, un lieu public et je ne suis pas obligée de « soutenir Wikileaks » pour avoir le droit d’être là, n’importe qui peut venir ici comme simple observateur. Je suis réellement effrayée mais j’essaye de leur rappeler qu’une association de défense des droits de l’homme, telle que Wikijustice, n’a vocation à défendre que des êtres humains, pas des organisations, en l’occurrence un homme, Julian Assange, pour la défense duquel je suis ici. Les deux personnalités féminines se font menaçantes et dans l’étroitesse de l’espace du sas je crains pour ma sécurité physique : « vous avez vu, elle ne soutient pas Wikileaks » ! crient-elles. Devant moi Angela Richter a l’air d’être de leur côté, les autres baissent la tête. Alors, je fais face à mon premier assaillant et je hausse le ton également. Cela attire enfin l’agent de sécurité qui cesse de se planquer dans les recoins et fait venir deux hommes habillés d’uniformes de police. Troisième surprise, les deux hommes me rendent responsable de la situation et menacent de m’expulser des lieux alors même que je me tais et que Patrick Hennigsen continue de m’insulter tranquillement devant eux. La scène est surréaliste. C’est la manageuse Rosie Sylvester qui me sauve du lynchage qui se prépare : elle apparait dans le sas, calme le jeu, donne des ordres à l’agent de sécurité. Les policiers s’en vont. Je reste silencieuse au milieu de la pièce, incapable de bouger.

Sevim Dagdelen et Heike Hänsel, députées de die Linke, hostiles et agressives vis à vis de moi le 25 février 2020 au procès de Julian Assange

Je crois malgré tout que la tension va se calmer et que nous allons bientôt entrer dans l’escalier. D’ailleurs, la raison du conflit a disparu car Kristinn Hrafnsson traverse le sas suivi par Jennifer Robinson, en robe verte et saluant les présents, et par les avocats Summers, Fitzgerald, Peirce et Lyon. Tous se dirigent vers la salle d’audience. Mais c’était sans compter avec les furies déclenchées : voilà que Rebecca Vincent resquille toute la file pour se planter devant Rosie Sylvester. Elle me désigne du doigt, lui dit à quel point je suis indésirable et d’autres horreurs que j’essaye d’oublier depuis. Je n’en crois pas mes oreilles, je n’ai pas vécu pareil harcèlement direct et absurde depuis que j’ai quitté l’école… Je dois défendre mon honneur et l’image de mon organisation. Toujours immobile au milieu du sas, entourée d’ennemis, je supplie Madame Sylvester de ne pas écouter ces propos diffamatoires… Elle me fait un signe mêlé de compréhension et d’impuissance. Néanmoins elle commence à préparer le passage vers la galerie et demande à « la famille » de se tenir prête à entrer. John Shipton, son frère, Gabriel Shipton et un autre jeune homme fendent la foule pour s’approcher d’elle et tout le monde les laisse passer. Mais alors encore un coup de théâtre a lieu : l’agent de sécurité préposé à notre surveillance dans la galerie apparait dans le sas et crie à tout va : «Monsieur Kristinn Hrafnsson est interdit d’entrer dans le public sur ordre du tribunal ! ». Les exclamations d’indignation fusent alors que Kristinn Hrafnsson revient de la salle d’audience dans le sas. Il exprime sa colère et son incompréhension. Alors John Shipton dit qu’il va annoncer aux médias que la famille boycottera l’audience. Aussitôt dit, aussitôt fait. Entre temps, l’agent de sécurité a enfin déverrouillé la porte menant à l’escalier de secours et je cours m’assoir dans la galerie. Curieusement j’accède à une des meilleures places pour voir Julian le plus près possible : le deuxième fauteuil du premier rang. Je ne suis pas inquiète pour Kristinn Hrafnsson et j’ai raison : à peine tous les spectateurs assis, il revient avec les trois membres des Shipton s’installer triomphalement sur les sièges réservés à la famille, suivi de Fidel Narvaez et de Craig Murray. L’audience se met en place laborieusement, la juge Baraitser n’est pas là et Julian Assange est absent du box. Beaucoup de bruit pour pas grand-chose. D’ailleurs, les députées allemandes Heike Hänsel et Sevim Dagdelen continuent de twitter sur l’incident sans que cela ne gêne notre surveillant alors qu’il est 10 heures passées.

Rebecca Vincent qui m’a agressée dans la Woolwich Court le 25 février 2020

Le public se lève enfin pour la juge Baraitser. Le troisième jour, Kristinn Hrafnsson décidera que nous devons nous lever pour l’arrivée de Julian Assange ce qui est fait de bonne grâce. Mais ce mardi, avant son arrivée, je vois la manageuse discuter avec la juge et Baraitser lève un regard interrogateur et courroucé vers le public. C’est l’une des rares fois où on la voit nous scruter. Peu après Julian Assange arrive dans le box avec les deux gardiens. Il s’assied au milieu du banc et je le vois de beaucoup plus près, cinq à six mètres en dessous du balcon de la galerie. Il porte le même costume gris que la veille et dans les mains non pas le volumineux classeur, mais un cahier A4. Il n’a plus de lunettes, et fait tout de suite signe en portant sa main à son oreille qu’il n’entend pas. Il a l’air très abattu et il ne salue ni ne regarde personne. Je vois son visage marqué, ses yeux paraissent enfoncés dans les orbites. Il a l’air de souffrir intérieurement, et son immobilité pendant la journée confirmera cette première impression.

photo fuitée de la salle d’audience. Zoom sur l’espace des journalistes. Assange est invisible au fond à gauche

Edward Hamilton Fitzgerald s’engage d’abord dans un dialogue avec la juge concernant la transcription des débats. Alors qu’il objecte que c’est une entreprise privée qui effectue ce compte-rendu, la juge Baraitser lui répond que cela ne fait pas de différence. Pour l’avocat c’est une question de coûts qui devraient être partagés par les deux parties. Il n’a pas tord : nous avons fait établir un devis pour la transcription de l’audience du 23 janvier et il s’élevait à plus de 100 livres pour 45 minutes de procès, je n’ose imaginer combien le public devrait payer pour bénéficier de l’intégralité des actes qui devraient être gratuits et accessibles, la justice en démocratie devant demeurer un service public…La présence la veille de manifestants français aguerris dans les luttes contre les privatisation du service public prend alors tout son sens. D’ailleurs, ils ont galvanisé les manifestants anglais dont on entend ce matin les slogans et les chants dans cette salle même.

Ensuite Hamilton Fitzgerald aborde la question des violences auxquelles les gardiens auraient soumis Julian la veille : menottes et fouilles au corps répétées. Je sais que le dernier rapport d’inspection de la prison Belmarsh stipule pourtant que les personnes en détention provisoire ne doivent pas être menottées et surtout le scanner corporel dont la prison est équipée rend désormais inutiles et interdites les fouilles au corps, ces pratiques sadiques d’un autre âge[1]. Je suis surprise que la juge Baraitser renvoie l’avocat à « d’autres autorités » alors qu’elle est juge et garante du « fair trial », du procès équitable. Elle rajoute cependant qu’il « doit être bien traité » comme si c’était une faveur et non pas un droit essentiel dans un Etat de droit. L’avocat bégaye « qu’il espère aussi que l’autorité va se pencher sur le problème ». Julian Assange reste immobile et on ne sait s’il entend ce qui est dit. Ses gestes répétitifs de douleurs reprennent : il frotte ses doigts, bascule la tête vers le plafond en clignant des yeux… On sent encore plus fort qu’il cherche à s’évader de cet endroit et qu’il ne peut le faire qu’en quittant son corps dans une forme de dissociation. Quelques minutes plus tard, alors que Mark Summers commence sa plaidoirie, Julian Assange balance imperceptiblement son corps d’avant en arrière. Il ne se lèvera même pas pour prendre le dossier que lui tend Gareth Peirce lorsque Summers aborde le vif du sujet.


[1] https://www.justiceinspectorates.gov.uk/hmiprisons/wp-content/uploads/sites/4/2018/06/Belmarsh-Web-2018.pdf

https://s3-eu-west-2.amazonaws.com/imb-prod-storage-1ocod6bqky0vo/uploads/2018/11/Belmarsh-2017-18.pdf

Points d’orgues et zones d’ombres de la plaidoirie – qui est le responsable pour « Wikileaks »

Mark John Summers annonce d’une voix forte qu’il va prouver que les trois accusations portées par le procureur contre Julian Assange sont fausses : la première concerne le hacking du mot de passe avec Chelsea Manning, la deuxième d’avoir sollicité Manning pour la livraison de 4 bases de données, la troisième d’avoir prétendument mis des personnes en danger par les publications. Summers dit s’appuyer sur l’analyse du professeur Grotov qui a décortiqué les dépositions de Chelsea Manning lors de son procès. Il apparait selon ces dépositions, que Manning aurait eu accès aux documents incriminés via un « Protocoll SIPA », c’est-à-dire une base de données accessible à au moins 1000 analystes militaires sans qu’il lui soit nécessaire de forcer le moindre mot de passe. L’avocat insiste que c’est une preuve d’innocence de Manning connue du gouvernement états-unien car confirmée par l’attorney (procureur). Concernant le fait que Julian Assange aurait «sollicité » Manning pour lui fournir les documents, Summers explique à la juge que Wikikeaks fonctionne sur le même principe collaboratif que Wikipedia et que n’importe qui peut « à tout moment collaborer en fournissant des documents ». Ce n’est pas tout à fait exact, parce que du fait du système de cryptage mis en place pour les documents soumis, le site « Wikileaks.org » fonctionne plutôt comme un portail que comme une plateforme. Dans une plateforme celui qui propose un service ou un bien en reste propriétaire et garde le contrôle de ce qui est publié alors que dans un portail l’envoyeur de données se dessaisit du contrôle et de la propriété de ses documents au profit du propriétaire du site. Il est clair qu’une fois les documents envoyés à Wikileaks, le lanceur d’alerte ne décide plus de ce qui en sera fait. Je crains que cette description non pertinente du fonctionnement du site de « Wikileaks » par son avocat ne porte préjudice à Julian Assange. Il aurait été plus judicieux de démontrer que Julian Assange n’est pas responsable des publications sur le site car ce n’est pas lui mais John Shipton qui est propriétaire du nom de domaine du site. Par ailleurs il aurait été possible de rappeler, sur la base du rapport d’activité de la Wau Holland Stiftung, que Julian Assange avait signé le 21 décembre 2010 avec cette structure un contrat de coordinateur de projet assez léonin qui lui liait les mains et ne lui donnait aucune latitude sur le choix des documents à publier. Pis, dans la période incriminée, selon les rapports mêmes de la fondation, il est littéralement pressuré par ses donneurs d’ordre, les chefs de la Wau Holland, pour publier le plus rapidement tous les documents fuités. Il ne maitrise ni le rythme du travail de publication, ni le budget du projet ni même le choix de l’embauche de ses collaborateurs[1]. Dans son rapport d’activité de 2010 la Fondation Wau Holland assume clairement la pleine responsabilité du projet Wikileaks : « Es ist das bisher größte Projekt der Stiftung und stellt damit neue Anforderungen an die Abwicklung und das Controlling »[2] (« C’est jusqu’à présent le plus grand projet de la Fondation et ainsi il nous pose de nouveaux défis en terme d’implémentation et de contrôle de la réalisation »).

Andy Müller Maghun, le président de la Wau Holland Stiftung, le vrai boss de Wikileaks. Absent au procès.

Pour Summers, ce qui compte est le fait que les documents de Manning ne figuraient pas sur une liste précise de publications « Wikileaks » et ainsi il n’y aurait pas de preuve des sollicitations pour les obtenir, d’autant plus que l’analyste a toujours affirmé les avoir téléchargés de son propre chef. Pendant que l’avocat récuse l’appellation de « matériel sensible » puisque de nombreux salariés de l’armée américaine auraient eu accès aux documents, Julian Assange a l’air d’aller de plus en plus mal. Il prend sa tête entre ses mains, croise les bras et serre ses mains sous ses aisselles, s’agite doucement sur le banc, frotte encore ses doigts d’un contre l’autre… C’est comme une protestation muette.

Son menton est figé, ses traits crispés. Il prend son étui à lunettes, le repose, son avocat réfute alors l’accusation de « mise en danger d’autrui » en expliquant le partenariat que « Wikileaks » avait signé avec des « organisations sérieuses », les grands médias comme le New York Times, le Guardian, El Pais et Le Monde afin que ceux-ci notifient à « Wikileaks » les documents problématiques pour en expurger les noms. John Goetz est notamment cité comme témoin qui certifiera comme journaliste du « Spiegel » que « Wikileaks protégeaient les noms » alors que le professeur Grotov fournit la preuve que le comportement de l’organisation n’est pas coupable de « recklessness », d’indifférence face aux conséquences. Pour moi, la lecture des comptes rendus annuels de la Wau Holland Stiftung montre que Julian Assange n’avait pas un plein pouvoir de décision sur la façon dont les documents étaient réécrits par l’équipe de 11 à 25 personnes qui ont été salariés sur le projet « 04 Wikileaks Informationsfreiheit verteidigen» (« Projet 04 Wikileaks, défendre la liberté d’expression ») de décembre 2010 à décembre 2011 (journalistes-rédacteurs, chef de projet médias, production de vidéos, traduction, chefs de projet, assistant de direction, organisation événémentielle, développement informatique, préparation technique et mise en ligne des documents, chef de projets…)[3] mais le véritable responsable du projet, Andy Müller Maguhn, délégué du CA de la fondation pour un suivi plutôt tatillon du projet. Par ailleurs, une analyse détaillée des tâches sur chaque poste prouverait à coup sûr que le travail de réécriture des documents a effectivement été très important. Il devrait même être possible de prouver par quel processus et par quel salarié de la fondation Wau Holland chaque nom incriminé par l’accusation a été expurgé de la publication finale.

Andy Müller Maguhn contrôle le travail de Julian Assange en 2011

Il est dommage que l’avocat de Julian Assange laisse dans l’ombre tant de pistes importantes pour l’innocentement de son client. Mais hélas comme aucune collaboration entre l’équipe d’avocat et les soutiens militants n’est prévue, mon avis ne sera pas entendu. Vers 11h45 la juge Baraitser interrompt la plaidoirie pour la pause de 10 minutes. Je suis forcée de redescendre dans le sas ou je crains désormais les débordements agressifs des personnalités. Je reste debout dans la partie centrale du sas, craignant qu’on me pousse dehors si je reste derrière. Cependant je glisse doucement en Allemand à Madame Dagdelen quelque mots sur l’égalité, une notion qu’elle devrait s’approprier en tant que députée du peuple allemand et élue sur les listes du parti héritier de toutes les traditions historiques de la gauche allemande. J’aurais aimé aussi lui dire que je ne reconnais pas dans son comportement vis-à-vis de moi le parti dont j’ai été membre de 2007 à 2012. J’y ai milité au sein de la section femmes LISA ou j’ai œuvré à l’élaboration du programme « pour un service public de la petite enfance » en coopération avec les féministes françaises et l’écrivaine Frigga Haugg, j’ai participé aux réunions avec Lothar Bisky pour inclure ce document dans le programme général du parti. J’ai aussi beaucoup coopéré avec ma collègue Christiane Reymann à la création de relations avec les féministes polonaises et les partis de gauche en Pologne. Je me demande ce qui est arrivé depuis pour que j’ai à vivre des scènes aussi terribles qu’absurdes de la part de l’élue d’un parti où je garde des amitiés. Un seul incident dédramatise mes tristes constats: une collègue me désigne Angela Richter qui délestée de sa béquille qu’elle a utilisée pour entrer la première comme « handicapée », se dégourdit les jambes tranquillement. Nous sourions de concert : être actrice est un métier utile en toutes circonstances !


[1] http://www.wauland.de/media/2011_Jahresbericht.pdf, rapport d’activité 2011

https://www.facebook.com/notes/wikijustice-julian-assange/conférence-de-presse-du-20022020-deux-infos-capitales-two-major-news/493132691323050/

[2] Rapport d’activité 2010, http://www.wauland.de/media/2010_Jahresbericht.pdf, page 2

[3] document « Projekt 04: Informationsfreiheit verteidigen » Vorläufiger Transparenzbericht 2010 » – « Projet 04, défendre la liberté d’expression, bilan de transparence 2010 provisoire »,

Page 4 https://www.wauland.de/media/2010_Transparenzbericht-Projekt04_de.pdf

Et document « Jahresbericht 2011 », rapport d’activité de 2011, page 1, https://www.wauland.de/media/2011_Jahresbericht.pdf

Heureusement que la pause ne dure pas longtemps. Je me précipite dans la galerie dès que je peux, j’y ai perdu ma bonne place mais je suis soulagée de voir qu’avant que les débats ne reprennent Julian Assange a l’air un peu moins en souffrance. Il est vrai que Baltzar Garzon vient lui serrer la main avec empathie et qu’il peut échanger quelques mots avec les avocats espagnols. De plus, ma place plus lointaine ne m’empêche pas de remarquer que peu après il me regarde droit dans les yeux. Je lui souris et je fais un signe de la main tout en prenant soin de ne pas me faire trop remarquer du surveillant.

Pendant ce temps Summers narre la cyberattaque dont le site Wikileaks avait été victime et raconte la scène du film « Risk » dans laquelle Julian Assange téléphone à Hillary Clinton en compagnie de Sarah Harrison, salariée de « Wikileaks ». Puis il cite les médias et sites qui ont rediffusé les mêmes documents (dont le Spiegel et Cryptome) et aucun n’a été accusé par la justice états-unienne. Il conclut que la demande d’extradition n’est pas « fair, raisonnable, correcte» puisqu’elle discrimine un des acteurs de la même action. La plaidoirie continue mais certains ne tiennent plus en place dans le public. Gabriel Shipton prend congé des personnalités qu’il connait et quitte la pièce. Les personnalités assises devant moi partagent une tablette de chocolat et discutent entre elles comme au spectacle. L’avocat donne quelques précisions pour réfuter l’accusation d’intrusion informatique. Assange écrit quelque chose dans le cahier et passe le petit mot à Stella Morris. Summers aborde le téléchargement par Manning des « rules of engagement », « le droit d’engager » c’est-à-dire le permis de tuer par les soldats américains, directement lié, selon lui, au film « Collateral murder ». Manning aurait téléchargé cette video du meurtre de civils irakiens et de journalistes de Reuters juste après avoir pris connaissance des «règles de tuer » et aurait décidé seul de sa publication immédiatement après. C’est un peu dommage que Summers fasse l’impasse sur le travail des techniciens, journalistes et députés islandais qui ont «réécrit », ou « re-monté » la vidéo[1], qui figurent au générique du film et qui logiquement sont autant responsables pour sa publication que les Allemands de la Wau Holland pour leur « projet Wikileaks 04» en général[2]. Mais cette omission me parait pour l’heure moins grave du moment que Julian Assange n’est pas poursuivi pour cette production, même si dans la bouche de l’avocat l’homme accusé disparait encore une fois au profit de « l’entité inconnue Wikileaks ». Baraitser finit la séance en reconnaissant que le « gouvernement aurait effectivement dû mettre les publications dans leur contexte ». L’avocat parait avoir gagné la bataille. Enfin. On aurait presque eu envie de l’applaudir. Il est 13 heures, le juge Baraitser décide de la pause. Julian Assange s’anime, se lève. Il salue Garzon, appelle Summers et lui dit quelque chose en affichant un air mécontent. Je reste pour le voir partir entre deux gardes et je reconnais à sa démarche hésitante qu’il est fatigué, puis je suis sommée de quitter les lieux.

Julian Assange en juillet 2010 – il n’y a plus aucune photo de lui nette et de près en 2019 ni 2020

Baraitser a déjà commencé à écourter les débats : de 45 minutes le lundi, la pause midi rallonge à une heure mardi et jusqu’à une heure et demie le dernier jour. Cela m’arrange car je peux quitter le sas étouffant et rempli d’agressivité pour m’acheter un en-cas et un café à la petite cafétéria du tribunal. Je fais mon compte rendu des agressions subies en téléphonant à la direction de Wikijustice et j’observe par la baie vitrée du premier étage Baltazar Garzon quitter le bâtiment définitivement avec son staff. Je remarque le personnel judiciaire de la Woolwich Crown Court habillés de costumes noirs et de perruques sortir de l’aile droite du bâtiment pour passer leur pause dans le hall, la cafeteria ou le jardin. Puis je n’ai pas d’autre choix que de retourner dans le sas pour ne pas être éjectée de la file. Les « personnalités » occupent déjà la première place, elles discutent entre elles de problèmes familiaux et domestiques. Randy Credico, toujours un peu dépassé par l’étrange atmosphère, tente de détendre l’ambiance par des blagues. Des journalistes venus de leur annexe ou ils disent avoir du mal à entendre le procès, se sont précipités pour occuper notre espace public si réduit. Le risque d’être éliminée revient, je dois être donc présente. Je remarque alors que les trois quarts des présents dans ce sas sont des Allemands. C’est curieux. La tension avec les « personnalités » de die Linke semble s’être calmée mais je ne peux éviter une légère altercation avec un jeune homme allemand qui me pousse sans ménagement vers l’arrière. Il est surpris que je lui réponde en Allemand. Lorsque l’heure tourne et que les avocats rentrent de pause, Angela Richter nous annonce qu’elle a réussi à obtenir une place dans la salle d’audience parmi les journalistes. Elle exprime sa joie, reprend sa béquille-outil de lutte et sort du sas en clopinant.

Angela Richter, une des militantes agressives avec moi le 25 février 2020

Cette fois l’agent de sécurité demande leur pièce d’identité à la « famille ». John Shipton sort un passeport bleu marine neuf, mais je n’ai pas le souvenir que Kristinn Hrafnsson ait dû présenter le sien. Le frère et le fils de Shipton sont partis, il y aura des places libres dans la pièce en général, je presse mes amis restés dehors de tenter d’entrer, mais les agents postés devant le bâtiment les en empêchent. D’ailleurs, malgré quelques sièges vides, je ne peux récupérer dans la galerie qu’une place assez éloignée de Julian Assange.

Quand Julian Assange entre dans le box, il ne salue pas ni ne regarde le public. Il s’assied à la même place, jambes jointes et mains sur les cuisses. J’ai l’impression qu’il a l’air intimidé cette fois ci. Et je me demande si dans la pause on lui donne à manger, car il n’a toujours pas de bouteille d’eau dans le box que je devine inconfortable. Dès que la juge arrive, Mark Summers reprend son argumentation: prouver que Chelsea Manning n’avait pas besoin de craquer un mot de passe pour accéder aux documents classifiés. En ce qui concerne les « war diaries », les « journaux de guerre », il existait un réseau d’échange de données interne à l’armée, « Sydney I » pour l’Irak et « Sydney A » pour Afghanistan. Il était possible d’accéder à ces bases par un métalien pour les télécharger et c’est ce que Manning a fait, car « selon sa conscience il était nécessaire que le public connaisse le nombre de victimes civiles et les assassinats par drone ». Pour l’avocat, Julian Assange n’a donc pas sollicité de posséder ce matériel et le procès n’est donc pas « juste équitable et raisonnable ». Quant à la récurrente question des « noms sensibles » contenus dans les documents, Summers explique que Manning n’a jamais voulu garder les noms de code SIGAD (indicateur alphanumérique qui identifie les stations d’écoute des USA) et que 20% des documents sur l’Afghanistan n’ont pas été publiés précisément à cause des noms afghans y figurant.

Julian Assange en tant que coordinateur du projet 04 Wikileaks pour la fondation allemande Wau Holland – extrait du rapport d’activité de la fondation 2011

Julian Assange est resté immobile accoudé au dossier du banc pendant toute la tirade. A ce moment précis, John Shipton ne lève et quitte la galerie du public, son téléphone à la main. C’est alors qu’Assange regarde vers nous et je peux croiser son regard. Il reste un moment dans cette position, le visage tendu vers le haut, comme lorsqu’on fait pour se relaxer les épaules tendues. Mark Summers prend alors de la hauteur pour «expliquer l’approche de Wikileaks » à la juge. En fait il cite des conversations entre deux journalistes du « Spiegel », Schmitt et Goetz, qui décrivent « l’assistance technique » dont « Wikileaks » aurait besoin pour que son « équipe réécrive les mauvais endroits ». Finalement selon eux « Wikileaks » aurait demandé plus de temps et a fini par être critiqué pour avoir « over-redacted » (modifié trop largement) les documents. Nous savons que ce n’est pas pour rien que des acteurs allemands sont cités dans le dossier, puisque c’est la Wau Holland Stiftung, fondation allemande, qui sous la houlette de Andy Müller Maguhn, délégué du CA pour la supervision du projet 04 Wikileaks qui a dirigé l’équipe chargé de re-rédiger les documents. Les rapports d’activités de 2010, 2011 et 2012 de la fondation nous apprennent même que plusieurs journalistes étaient payés par la fondation pour ce travail et qu’en 2011 ils ont touché pour ce faire[3] 58 578 Euros. Malheureusement l’avocat ne cite pas la Wau Holland comme témoin clé voire acteur du processus de rédaction.


[1]

[2] Conseil d’Administration de la Wau Holland Stiftung 28.12.2009, http://www.wauland.de/media/2009-12-28_Protokoll.pdf

Rapport d’activité 2009, http://www.wauland.de/media/2009_Jahresbericht.pdf

Rapport d’activité 2010, http://www.wauland.de/media/2010_Jahresbericht.pdf

« Rapport de Transparence – projet 04, défendre la liberté d’expression 2010 », http://www.wauland.de/media/2010_Transparenzbericht-Projekt04_de.pdf

Rapport d’activité 2011, http://www.wauland.de/media/2011_Jahresbericht.pdf

« Rapport de Transparence – projet 04, défendre la liberté d’expression 2011»,

http://www.wauland.de/media/2011_Transparenzbericht-Projekt04_de.pdf

« Rapport de transparence projet 04, défendre la liberté d’expression 2012 -rapport pour les 6 premiers mois de 2012 »

http://www.wauland.de/media/2012_Transparenzbericht-Projekt04_de.pdf

« Rapport de transparence projet 04, défendre la liberté d’expression 2012 »

http://www.wauland.de/media/2012-1_Transparenzbericht-Projekt04_de.pdf

[3] « 5.8 Journalistische Aufbereitung Zur journalistischen Aufbereitung, insbesondere der Kontextualisierung zugegangenen Materials und der erklärenden Beleuchtung von Hintergründen und Zusammenhängen, wurden verschiedene Journalisten engagiert und ihr Aufwand entsprechend vergütet. Im Jahr 2011 waren damit insgesamt 6 Journalisten als Hilfskräfte in diesem Aufgabenbereich tätig. »,( « Pour la mise en forme journalistique, en particulier la mise en contexte des documents et l’explication du contexte historique et des relations, différents journalistes ont été engagés et leurs efforts indemnisés en conséquence. En 2011 en tout 6 journalistes ont été actifs comme « personnel aidant » dans ce domaine »)

Page 5, https://www.wauland.de/media/2011_Jahresbericht.pdf

Wikileaks, l’Allemagne, et la Wau Holland Stiftung

Sur ce la juge Baraitser décide d’une pause de 10 minutes. Je suis fatiguée car je ne me repose absolument pas dans l’ambiance hostile du sas. Mais l’après-midi avance et l’attrait du procès s’émousse visiblement. En effet, les députées de die Linke ne reviennent plus ni dans le sas ni dans la galerie. Je sympathise avec Volker, un des militants allemands qui a témoin de l’agression du matin qui l’a visiblement choqué. Nous discutons un peu de l’état de Julian Assange et de ce que nous voyons en partageant dans la pause un café et une barre de céréales. Il trouve intéressante ma façon de prendre des notes. L’ambiance s’adoucit même si le public reste étrangement à plus de 80% composé d’Allemands et de germanophones. Il en sera ainsi les jours suivants, le 26 et 27 février.

A notre retour, Summers décrit la messagerie Jabber que les soldats américains utilisaient pour leurs loisirs et cite des supérieurs hiérarchiques de Manning qui auraient certifié qu’il était courant pour les soldats de jouer à cracker mutuellement leurs mots de passe. Manning était même tellement douée qu’elle en aurait fait une activité commerciale, validée par une de ses chefs qui lui aurait demandé carrément d’installer un logiciel interdit. Conclusion : Manning n’avait pas besoin des compétences informatiques d’Assange pour s’introduire dans des bases interdites. A cette évocation visiblement douloureuse, Julian Assange se balance légèrement d’avant en arrière puis revient dans sa prostration initiale. L’avocat conclut que les accusations n’ont pas pris en compte le contexte et sont donc abusives. Pour le prouver, il abandonne la jurisprudence états-unienne qui était sa référence jusqu’alors (toute l’analyse du comportement de Manning étant contenu dans son dossier juridique selon le droit américain), mais détaille la jurisprudence européenne en se servant des cas Castillo, Murua et le Polonais Sekrewski. Les deux plaignants auraient gagné à la Cour Européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg contre une demande d’extradition en prouvant les abus de procédures. Je vérifie sur les jugements dans la base de données HUDOC de la Cour de Strasbourg : seul le jugement de Algar Castillo est répertorié[1]. Pendant que l’avocat invoque le droit européen pour juger un Australien poursuivi par les Etats Unis, Assange regarde les 25 journalistes assis derrière des pupitres à sa gauche. Ses gestes nerveux reviennent. Il n’y a aucun signe de connivence avec ceux qui devraient être ses confrères de métier.

Rapport d’activité de la fondation allemande Wau Holland en 2009 – les projets TOR, Jabber et Wikileaks sont décidés

Baraitser interrompt alors l’avocat pour lui demander si Manning avait été déclarée coupable. Oui, doit admettre Summers, mais le procès a été contesté, reprend-il. Mais il n’argumente pas que les aveux de Manning ont été arrachés après torture ce qui les rend en réalité non recevables… du fait justement de la torture. Il reprend son discours sur la jurisprudence européenne et rappelle la déjà longue histoire des abus juridiques que subit Julian Assange : les « accusations suédoises », l’impossibilité de quitter les locaux de l’Equateur… Face à l’historique connu qui l’agace peut-être, Baraitser questionne l’avocat sur les faits : oui ou non la page internet Wikileaks sollicitait elle le public pour lui envoyer des documents secrets ? Le procureur intervient alors: pour lui les sollicitations sont clairement exprimés sur la page internet « Wikileaks ». Dans un vrai procès, il est d’usage de produire devant le public les passages discutés : le grand écran qui trône dans la salle aurait pu servir à voir le site incriminé, mais il reste éteint et le juge ne demande pas au procureur de prouver ses dires. De même l’avocat ne se sert pas du fait que le propriétaire du site n’est pas Julian Assange mais John Shipton pour invalider l’accusation de « sollicitation actives », alors même que John Shipton ne risque rien puisqu’qu’il a déjà gagné en février 2009 en Californie le procès contre la banque Julius Baer. Le jugement du tribunal californien a bien invoqué le premier Amendement, le« droit de recevoir des informations » pour débouter Julius Baer de sa demande de fermeture du site Wikileaks appartenant à John Shipton après publication de ses listings bancaires[2]. Le jugement californien est valide alors même que Wikileaks y est qualifiée « d’entité inconnue », ne possédant donc ni siège social ni structure. Julian Assange ne devrait donc pas être condamné pour la même chose pour laquelle son père a été relaxé. Hélas, en ne posant pas ces arguments, j’ai le sentiment que Mark Summers donne quartier libre au procureur qui affirme que Julian Assange aurait dit à Manning « je suis curieux de voir tous les documents », là encore sans amener la moindre preuve matérielle (une retranscription des conversations sur Jabber par exemple). Le procureur martèle que le sort de Julian Assange doit être déterminé aux Etats Unis car « Julian Assange décidait de publier sur le site internet Wikileaks ». Le rôle des Allemands de la Wau Holland Stiftung est passé ainsi à la trappe. On comprend que l’accusation américaine ne veut pas brusquer son plus précieux allié en Europe, l’Allemagne, en l’impliquant dans un procès gênant. Mais j’avoue que je comprends moins la stratégie des avocats de plutôt sauver Andy Müller Maghun et les autres membres du CA de la Wau Holland Stiftung que Julian Assange qui est leur client.

John Shipton comme propriétaire de l’entité inconnu Wikileaks

Pendant la tirade du procureur, alors qu’il paraissait très fatigué, Julian Assange se lève et appelle Gareth Peirce. Elle met un certain temps à l’entendre et à venir vers lui, puis elle se rassied. Assange parle alors à Jennifer Robinson qui a pris le siège laissé par Garzon. Jennifer Robinson incite Peirce à sortir de sa réticence et revenir écouter son client même si elle ne le regarde toujours pas lorsqu’elle s’adresse à lui. Enfin, lorsque Summers a fini son argumentation, Edward Hamilton reprend l’organisation de la défense. Il propose à la juge de déposer un « sommaire des vices de procédures » le lendemain. Hélas, en l’absence de micro on n’entend pas ce que dit Julian Assange à ses conseils. Il est 16 heures, Baraitser se lève. Nous sommes tous très fatigués et la cérémonie du départ est réduite. Mais demain, je serais fidèle à mon poste ici.

Pour la Woolwich Court, le procès Assange n’existe pas. Le planning ne prévoit pas d’audience salle 2 pour le 25 février 2020

[1] https://hudoc.echr.coe.int/eng#{« fulltext »:[« Castillo »], »documentcollectionid2″:[« GRANDCHAMBER », »CHAMBER »]}

[2] http://www.dmlp.org/sites/citmedialaw.org/files/2008-02-26-Brief%20of%20Intervenors%20to%20Dismiss%20for%20Lack%20of%20Subject%20Matter%20Jurisdiction.pdf

http://www.dmlp.org/sites/citmedialaw.org/files/2008-02-28-Notice%20by%20John%20Shipton%20of%20Intent%20to%20Appear%20and%20Joinder%20in%20Motions%20and%20Oppositions%20of%20Amici-Intervenors.pdf

https://www.facebook.com/notes/wikijustice-julian-assange/conférence-de-presse-du-20022020-deux-infos-capitales-two-major-news/493132691323050/

https://www.courtlistener.com/opinion/1737559/bank-julius-baer-co-ltd-v-wikileaks/?fbclid=IwAR3hpvyy6MfaKv84HnVWNeR1oMu6wvJosyK9gBhFcUGyFrlxGQSBmlYpYas

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